58 milliards d’euros : c’est le chiffre d’affaires que dégage le secteur aéronautique en France, sur un PIB de 2430 milliards environ, soit 2,5%. A titre comparatif, c’est quatre fois moins que le secteur automobile.
Pour soutenir la filière aéro, comme il l’a fait pour le tourisme ou justement l’automobile, le gouvernement vient d’annoncer son plan de soutien. Il se monte à 15 milliards d’euros. Le chiffre est globalement bien accueilli par la filière, qui emploie 300 000 personnes, dont près d’un tiers pour les seuls Airbus (47 000 salariés en France) et Safran (45 000 salariés en France). Les deux mastodontes ont subi un recul colossal de leur activité à la suite de la pandémie, de l’ordre de 40% pour Airbus et 50% pour Safran. Où va se diffuser cette manne tant attendue ?
Déjà, ces 15 milliards ne sont pas une somme promise à distribution sans condition. Ils devraient également inclure les 7 milliards déjà promis à Air France, mais aussi prendre la forme de prêts garantis ou directs.
Pour le reste, la priorité du gouvernement ira à la sauvegarde de l’emploi et des compétences, une mesure indispensable pour un secteur fort de 35 000 ingénieurs. Le plan prévoit en outre la garantie de l’État pour les commandes à l’export. Il rassure ainsi les compagnies étrangères ayant déjà signé des commandes chez Airbus : l’État se porte garant de leur bonne livraison. Enfin, l’État a accordé un moratoire sur le remboursement des échéances dues par le secteur aéronautique à leurs banques.
Reprise en U ou en V ?
Reste que la reprise est sujette à débat. Les constructeurs ne l’attendent pas avant 2023. Les salariés et syndicats semblent plutôt miser sur 2021. Ils font notamment le parallèle avec l’automobile. Une récente étude du cabinet AlixPartners estime que ce secteur connaîtra probablement une rapide reprise, en « V » plutôt qu’en « U ». Cette étude signale notamment qu’en Chine, le ventes d’avril 2020 sont déjà revenues au niveau de celles d’avril 2019. Une forte croissance est également attendue sur les marchés américains et européens.
Mais le même cabinet a présenté ce 11 juin son approche de reprise pour l’aéronautique. Elle adopterait bien un profil en « U ». Motifs : confiance en berne des passagers pour reprendre l’avion et des frontières qui restent fermées. Au final, le cabinet estime à « 65% à 70% la baisse de trafic pour 2020, et environ 35% pour 2021. Le retour à la normale est attendu pour 2023…voire 2024, surtout pour les longs courriers. Les voyages business vont aussi être impactés de manière durable et significative, notamment en raison de la récession qui va affecter les entreprises ».
Un prêt sous conditions
Pour la filière aéronautique, le gouvernement n’entend pas être qu’un garant financier. Il se veut chef d’orchestre et profiter de ce tournant pour remettre à plat un certain nombre de choses, à commencer par l’optimisation du tissu de sous-traitants.
En clair : « renforcer les PME et les ETI, les faire grandir, moderniser les chaînes de production et les rendre plus compétitives », indique Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, qui vise sur un fond qui devrait disposer, à terme, d’un milliard d’euros. Enfin, sans surprise, le gouvernement entend subordonner l’octroi d’une partie de cette enveloppe au développement d’une industrie aéronautique plus écologique. L’aide précédemment accordée à Air France (7 milliards) était déjà subordonnée aux mêmes exigences.